24 févr. 2009

Daniel Tremblay, la tête dans les étoiles

Depuis le 8 novembre se tient au musée des Beaux Arts d’Angers la troisième exposition consacrée à Daniel Tremblay (1950-1985). Le public angevin aura jusqu’au 3 mai pour découvrir les 36 œuvres majeures de l’artiste angevin.

Daniel Tremblay transcende la matière. Du caoutchouc à l’ardoise en passant par le vinyle, qu’importe, il donne vie aux choses. Déjà vingt ans d’âge mais son travail reste intact et plus moderne que jamais. « Je n’aime pas les choses définitives mais il y a quand même quelque chose dans l’éternité qui me plait beaucoup » expliquait l’artiste. En travaillant des matériaux bruts comme le marbre et le linoléum, Daniel Tremblay cherche à donner aux objets une dimension poétique. En littérature, Francis Ponge exprimaient l’âme d’objets incongrus comme le cageot, la cigarette ou encore le galet dans « Le parti pris des choses ». Dans cette lignée, Daniel Tremblay a conçu ses sculptures et installations pour éveiller la curiosité du spectateur et faire appel à son inconscient. « Raven’s Blues », « La lune et son reflet » ou encore « Jaune et noir » : des titres simples qui dissimulent une vision du monde profonde et aboutie. Inspiré par l’état de repos, le calme et le silence, l’artiste tente d’inspirer un sentiment de sérénité sur celui qui regarde son œuvre.

Avec des éléments récurrents comme le profil, l’étoile et le corbeau devenu poisson au hasard d’une manipulation, Daniel Tremblay dévoile là l’originalité de son univers. Il s’approprie tous les formats et ajoute de la matière vivante à ses œuvres. Vous pourrez y voir par exemple deux poissons rouges dans leur aquarium accompagnant un tableau. Dans cette harmonie abstraite, une création se démarque. Intitulée « The Last Wave », cette œuvre a décoré une pièce surplombant la plage de La Jolla en Californie. Sur la base de 5 modèles de cartes postales du site, ce sont plus de 2000 images vernies qui ont été collées du mur au sol, suggérant le débordement de l’océan dans la pièce. Exposée également outre-Manche et outre-Atlantique, l’œuvre de Daniel Tremblay semble toucher les êtres sensibles au rêve et à la poésie…

Danse macabre au Liban


Entre cauchemar et réalité, film d’animation et documentaire, Valse avec Bachir est un film déroutant qui revient sur l’horreur de la guerre au Liban.

Dans ce film autobiographique, Ari Folman, cinéaste israélien, fouille dans ses propres souvenirs pour se remémorer la guerre qui a marqué ses vingt ans au début des années 80. C’est une rencontre avec un de ses amis en pleine nuit dans un bar qui déclenche cette course à l’introspection. En proie à des cauchemars récurrents, l’homme lui raconte la peur qui l’envahit chaque nuit lorsqu’il est attaqué par une meute de 26 chiens. Ces 26 chiens renvoient en réalité à ceux qu’il avait dû tuer pendant la guerre au Liban. Dès lors, Ari se rend compte qu’il n’a plus aucun souvenir de cette guerre. Pourtant, le lendemain, une image vient hanter sa mémoire. Il se voit aux côtés de deux jeunes soldats israéliens, sortant de la mer devant la ville de Beyrouth. Il ressent à ce moment-là un besoin vital de recouvrer la mémoire et de comprendre ce qu’il a vécu durant cette guerre. Il va alors mener son enquête et aller à la rencontre d’anciens compagnons d’arme.

Dans cette quête au souvenir, la poésie côtoie l’horreur. Rythmées au son des plus grands tubes des années 80, les scènes de guerre surprennent. Elles mettent en scène de jeunes soldats tirant dans le vide, n’allant nulle part sur leur tank et se faisant abattre sauvagement par l’ennemi. Le film est habité en permanence par cette dialectique entre l’onirisme et le cauchemar. Elle reflète la perte de repères dont souffre le héros qui cherche sans cesse à connaître la réalité des actes qu’il a lui-même commis pendant ce conflit. À travers le dessin et l’animation, Ari Folman aborde des thèmes graves comme celui de l’absurdité de la guerre. Il rend l’horreur supportable mais n’adoucit pas pour autant les témoignages réels des anciens soldats israéliens. Plus qu’un film sur la guerre au Liban, Valse avec Bachir est un véritable document psychanalytique. Ari Folman fait sa propre thérapie à travers la mise en scène de son propre personnage. Incontestable réussite esthétique, Valse avec Bachir donne à voir la guerre comme elle est rarement filmée et époustoufle chaque fois qu’une image refait surface dans la mémoire du cinéaste.

23 févr. 2009

Te quiero Barcelona



Barcelone, l’été. Woody Allen s’installe dans la capitale catalane après une trilogie anglaise pour y tourner sa toute dernière comédie sentimentale. Pour la troisième fois consécutive, sa muse, Scarlett Johansson, est à l’affiche, aux côtés de deux acteurs espagnols inédits, Penelope Cruz et Javier Bardem. Le réalisateur américain conjugue, avec talent, ironie et profondeur et nous livre, pour sa 39e production, un concentré de grave légèreté.

Vicky (Rebecca Hall) et Cristina (Scarlett Johansson) sont deux jeunes américaines qui débarquent à Barcelone pour y passer l’été. Diamétralement opposées sur le vaste sujet de l’amour, elles vont découvrir les travers de la passion humaine. La première, Vicky, est réservée et déjà fiancée à un américain bien rangé. L’autre, Cristina, émancipée et impulsive, rêve de sensations fortes et d’amour passionnel.

La rencontre avec Juan Antonio (Javier Bardem) vont les conduire à Oviedo dans la campagne catalane. Artiste ténébreux, il multiplie les tentatives de séduction. Si Cristina est plus que réceptive à son charme et à ses propositions fantaisistes, le jeune espagnol va succomber au charme mystérieux de Vicky et l’entraîner dans une relation interdite et destructrice. Mais rongée par le remords, l’américaine met un terme à cette histoire sans lendemain. Dès lors, elle laisse place au trio emblématique du film : Juan Antonio, Cristina et Maria Elena (Penelope Cruz). Drôle et attachante en hystérique, la pulpeuse Maria Elena s’introduit dans le couple et les conduit à vivre un “ménage à trois” enivrant.

Woody Allen filme ici les chassés-croisés amoureux qui marquent l’éducation sentimentale des jeunes américaines. Dans une ville chargée de sensualité, les personnages luttent contre des envies satisfaites et des désirs refoulés. Ils évoluent dans un décor espagnol stéréotypé qui accentue la force et la puissance de leurs passions. La guitare espagnole de Paco de Lucia et la voix légère de Giulia y los Tellarini rythment les ébats, les colères et les tendresses de leur été à Barcelone. Condamné à l’insatisfaction, le quatuor tente de résister à des sentiments qui dévastent et qui épanouissent à la fois. Toujours soucieux de la complexité des rapports humains, Woody Allen donne à voir les différents symptômes de la passion amoureuse tout en mêlant l’humour et le comique de situation.

Je blogue, tu blogues... je critique, vous critiquerez...

Le bon critique est celui qui raconte les aventures de son âme au milieu des chefs-d'œuvre.

[Anatole France]

Comment prétendre juger le travail d'un artiste? Ce qui importe, je crois, c'est ce que procure son art et l'empreinte laissée sur le spectateur. La vision du monde qu'il dépeint à travers son œuvre est par nature touchante puisqu'elle séduit ou déplaît celui qui la contemple. Mais pourquoi se taire quand la magie de l'art opère? Je tenterai donc de suivre les conseils d'Anatole France et laisserai ma plume, portée par l'émotion, vous parler de cinéma, de peinture, de photo et de tout ce qui vous plaira...